Le tissage ancestral Andin : Un récit qui nous invite à réfléchir sur qui nous étions et qui nous sommes

Le tissage ancestral Andin : Un récit qui nous invite à réfléchir sur qui nous étions et qui nous sommes

“El olor de la lana y de la lluvia es nuestra paz y la voz de la madre es esa imagen de la Cruz de Mayo. [L’odeur de la laine et de la pluie est notre paix et la voix de la mère est cette image de la « Croi de Mai »] ” - Nicolás Aguilar Sayritupac, de “Los Aymaras somos eternos"

Ce passage de la célèbre chanson « Los Aymaras somos eternos » (Les Aymara sont éternels), nous dessine en quelques lignes la place du textile dans la culture andine. La Croi de Mai est une fête liée à la fertilité de la terre et à la production agricole dans la culture Aymara.





(2019) Purmamarca, Jujuy - Nord de L'argentine.




Les communautés avec qui nous travaillons au sein de Meune nous inspirent et nous honorent en nous permettant de travailler avec eux, et en nous donnant la possibilité d’utiliser leurs créations pour pouvoir en faire les nôtres. 

Cet article est dédié à tous celles et ceux qui souhaitent comprendre pourquoi aujourd'hui, plus que jamais, c'est fondamental et nécessaire de s'intéresser à la culture des peuples premiers. 

Rapprocher la culture et connaissance venantes du savoir ancestral andin avec le reste du monde pour trouver des réponses aux défis de la modernité, est l'un des engagements principaux qui nous prenons avec Meune.


CULTURE ET TRADITIONS ANDINES

Pour illustrer l’importance que nous accordons à l’utilisation du textile artisanal fait par les communautés autochtones en Argentine pour nos créations au sein Meune, il est important de parler de leur culture et traditions.

Je fais référence ici à l’ensemble des communautés autochtones d’Argentine et de la région andine pour vous raconter quelques aspects de leur culture qu’elles partagent, car évidemment, les traditions de chaque communauté sont différentes.

Ces communautés ont des préoccupations universelles, dont la plus puissante est celle d'ordonner le chaos, les temps et les espaces cosmiques et réel : pour que les êtres humains puissent vivre en harmonie avec la nature et élever ses enfants dans un endroit sûr et à l’abri. Elles cherchent à vivre en équilibre avec la nature, comme leurs ancêtres. Elles se comprennent comme faisant partie de la nature et en aucun cas, ils ne se considèrent comme des « maîtres » de l’univers, comme le suggèrent certaines religions ou pratiques occidentales. Pour la vie de ces peuples, l’humain, le naturel et le spirituel se complètent harmonieusement, les amenant à trouver le « bien vivre ».



El Federal (2016) "La importancia de los pueblos originarios para el cuidado del medio ambiente" [L'importance des peuples autochtones pour la protection de l'environnement] - Image recuperé www.elfederal.com.ar/la-importancia-de-los-pueblos-originarios-para-el-cuidado-del-medio-ambiente




Ces peuples conçoivent le monde et la nature comme un espace, où animaux, plantes, esprits, rivières, humains et des forces positives et négatives de la Nature coexistent et dépendent les uns des autres de manière globale, c’est-à-dire holistique et systémique. Ils sont attachés à l'idée de défendre la vie, pas seulement leur vie, mais aussi celle des espèces, celle du plus infime être vivant qui puisse exister : parce que tous répondent à une même chaîne de vie, alors que dans les pays dits « développés », ils ont davantage une conception de développement déprédatrice, destructrice de la vie.

Les communautés ont une approche du lien social très singulière. Ce lien communautaire repose sur des entrelacs d’échanges réciproques de biens et de services à tous les niveaux de l’organisation sociale, faisant de ces échanges des marqueurs identitaires aussi pertinents et déterminants que la langue, la religion ou le territoire.

Dans la plupart des communautés, et notamment chez les Mapuches plus encore aujourd'hui, les femmes jouent un rôle majeur dans la préservation et la transmission de cette Nature, de l’histoire et de la culture ancestrale. Les femmes, tisserandes ou orfèvres, racontent à travers leur art leur histoire de résistances et le lien primordial avec la terre que leur peuple entretient. Gardiennes d’un savoir-faire ancestral, elles transmettent aux nouvelles générations non seulement leur savoir-faire textile ou en orfèvrerie, mais également leur connaissance poussée de l’environnement naturel qui fournit les matières premières nécessaires aux créations : la laine, les fruits, les feuilles ainsi que les fleurs utilisées pour les teintures scellent une coopération féconde et sacrée avec  « la Terre Mère ».


Ciper Chile (2020) "Las mujeres Mapuche y el feminismo" [Les femmes Mapuche et le feminisme] - Image recuperé www.ciperchile.cl/2020/03/13/las-mujeres-mapuche-y-el-feminismo




Pour Meune, la Nature, l’Artisanat et la Femme, comme pièce maîtresse de cet ancrage naturel et culturel, sont au cœur de nos préoccupations et de nos engagements.

LE TEXTILE ANCESTRAL ANDIN



(2019) Cachi, Salta. Chemin des artisans au nord de l'Argentine.


Dans le tissage ancestral andin, chaque tricot comprend une histoire particulière et unique, comme les mains du tisserand. Cependant, considérés dans leur ensemble, ils constituent la trame narrative de leur histoire. Avec chaque fil qu’elles tissent, nouent, brodent ou tressent, elles construisent un récit qui parle d’elles-mêmes, mais aussi de l’être humain dans toute sa complexité. 
 
Un récit qui nous invite à réfléchir sur qui nous étions et qui nous sommes. 


Seclantás, Salta - Eduardo, memebre de la communauté Aymara.



 
L'utilisation des textiles est toujours rituelle, même à notre époque. C'est pourquoi il est important lorsqu'ils passent de main en main, car ils deviennent des patrimoines familiaux et communautaires. Ils sont tissés avec amour. 
Le retour aux enjeux de la terre que propose notre temps nous met au défi d'apprendre et comprendre leur culture et symbologie qui a inspiré et inspire encore le monde. Et ce, pour que leurs créations ne soient pas de simples reproductions, mais des créations conscientes et profondes qui nous invitent à repenser notre place dans le monde ainsi que le sens que nous donnons à nos vies. 
 
C’est cela qui nous pousse à agir avec engagement sur chaque pièce que nous réalisons avec les communautés : faire passer un message, un appel puissant pour un changement inéluctable dans le monde que nous vivons. 
 
Ainsi, il est crucial que le tissage artisanal, qui est une partie intrinsèque de leur culture, puisse continuer à vivre et inspirer l’humanité à travers le temps. 
 
Mais surtout, cet art doit absolument rester dans les mains des communautés détentrices de ce patrimoine ancestral. D’abord, car cet art leur appartient, et parce que sans eux il n’y existerait pas de message, d’histoire, de sens, ni de raison d’être.



(2019) Cachi, Salta. Au Nord de l'Argentine. Celia, membre de la communauté Aymara.



 
En tant qu'Argentine et créatrice de Meune, comme vous le savez déjà, je suis connectée et partage la vision du monde des peuples autochtones andins. Je suis convaincue que l’entraide, l’harmonie entre les êtres humains et avec la nature, ainsi que les femmes sont des piliers impératifs pour notre existence, tout comme pour les défis à venir. 
 
Nous avons hâte que vous fassiez part aussi, nous avons besoin de vous ! 



Écrit par Nahir, créatrice de Meune.

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1 commentaire

ce texte et cette pratique sont très inspirant.e Je suis fille de tisserande de arrière grand-mère en fille. nous sommes un jeune peuple et avons vécus la déportation des acadiens pourchassé par les anglais dans l’Acadie (Bas Canada). Mais nous n’avons jamais cessé de tisser. Merci pour ce merveilleux texte

Catheline Thériault

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